La marae Tahiti de Punaauia

Le MARAE TAHITI, appelĂ© aussi MARAE PUNAAUIA ou ATEHURU, Ă©tait installĂ© sur la terre TE ARA O TAHITI (« le chemin, l’éveil, la vigilance de Tahiti »), sur la rive droite de la PUNARU’U, 2 kilomĂštres Ă  l’intĂ©rieur de la basse VallĂ©e. 

Selon les rĂ©cits, il fut Ă©rigĂ© en l’honneur du mariage entre le ARI’I de PUNAAUIA, NUU, et NUUTEA, l’arriĂšre-petite-fille de TETUNAE, grand ARI’I, et le premier la lignĂ©e des Teva Ă  avoir ceint le MARO’URA et le MARO TEA [1]. « Pour cĂ©lĂ©brer cet Ă©vĂ©nement, une pierre fut prise sur le marae i Tahiti Ă  Vaiari, pour fonder un nouveau marae appelĂ© aussi Tahiti pour l’élĂ©vation de Nuutea comme Arii vahine ote Maro ura (Reine de la ceinture de plumes rouges). C’est ainsi que le district de Punaauia fut appelĂ© « Te Maro ura i Punaauia ».[2]

Lors de son voyage Ă  Tahiti en 1797 ayant pour mission l’installation de 18 missionnaires et leur famille sur Tahiti, le capitaine du DUFF, James WILSON, dĂ©crit le MARAE TAHITI ou TE ARA TAHITI dans la vallĂ©e de PUNARU’U comme suit : Â« le marae se trouve du cĂŽtĂ© nord de la vallĂ©e, Ă  environ un mile (1,6 km) ou plus de la plage ; il est Ă©levĂ© sur un terrain plat et entourĂ© d’une palissade carrĂ©e en bois dont chaque cĂŽtĂ© mesure trente ou quarante mĂštres. Environ la moitiĂ© de l’aire longeant le cĂŽtĂ© intĂ©rieur est dallĂ©e et sur ce dallage, presque au centre, se trouve un autel posĂ© sur seize piliers en bois mesurant chacun huit pieds de haut ; il a quarante pieds de long et sept de large. Au sommet des piliers est posĂ©e une plate-forme pour les offrandes, recouverte d’une natte Ă©paisse qui pend de chaque cĂŽtĂ©, formant une longue frange tout autour. Sur ces nattes sont posĂ©es des offrandes
 Sur un cĂŽtĂ© une bonne partie de la palissade Ă©tait tombĂ©e et une pile de grosses pierres posĂ©es Ă  sa place. Sur ces pierres alignĂ©es avec la palissade Ă©taient placĂ©es ce qu’ils appellent des ti’i, c’est-Ă -dire des planches de six Ă  sept pieds de haut sculptĂ©es de maniĂšre diverses. »[3]

La gravure de James WILSON, prĂ©sente un MARAE entourĂ© d’une palissade en bois. Il Ă©tait constituĂ© d’un AHU (plateforme) sur lequel s’élevaient des UNU [4] sur un amoncellement de pierres. Un FATA [5], ou table d’offrandes, soutenu par des poteaux en bois Ă©tait installĂ© prĂšs de l’édifice. Non loin, des constructions vĂ©gĂ©tales se dressaient ; probablement le FARE IA MANAHA (« maison des trĂ©sors cachĂ©s Â») et le FARE TAHU’A PURE (« maison du prĂȘtre Â»).

Un grand MARAE aux allures de compétitions entre chefferies

« Le relativement faible Ă©cart entre ces deux Ă©difices semble, Ă  l’évidence, indiquer une compĂ©tition qui a opposĂ© ces deux localitĂ©s et leurs chefs, et qui s’est soldĂ©e par la reconnaissance de la plus grande importance du Marae de Punaauia, et donc de sa suprĂ©matie. Il est devenu le Marae de rĂ©fĂ©rence de Atehuru, par rapport Ă  celui de Teva et il en a, donc, pris le nom. Il a Ă©tĂ©, en effet, dĂ©crit que le Marae de Punaauia Ă©tait un trĂšs ancien Marae Tupuna, lorsque celui de Mahaiatea fut Ă©rigĂ© par le roi Amo. S’il Ă©tait effectivement plus ancien, il Ă©tait aussi le plus petit des deux. Les grands rois (Arii maro ura), Temoanarau i Punaauia qui Ă©taient alliĂ©s aux Teva de Papara, craignaient de voir leur suprĂ©matie contestĂ©e du fait de la plus grande importance du Marae de Mahaiatea. Ils ordonnĂšrent donc que soient entrepris des travaux d’agrandissement de leur Marae vĂ©nĂ©rable avec le rĂ©sultat que l’on connaĂźt. Et depuis lors, le Marae Punaauia ou Atehuru fut le siĂšge royal d’un trĂšs grand nombre de Arii mana, ou Arii mano ura de Tahiti nui, et le lieu de la naissance de leurs fils aĂźnĂ©s»[6]

Le Marae TAHITI, un Marae TUPUNA

TE ARA O TAHITI Ă©tait un MARAE TUPUNA, dĂ©diĂ© aux ancĂȘtres, Ă  la famille des grands rois de PUNAAUIA. Â« Le marae tupuna exprimait la solidaritĂ© de la maisonnĂ©e. Les noms hĂ©rĂ©ditaires de la famille attachĂ©s au marae constituaient le moyen de prouver son titre de propriĂ©tĂ©. Chaque dalle du mur qui entourait le marae reprĂ©sentait un membre de la famille qui l’utilisait pour prier en s’agenouillant dessus. On y cĂ©lĂ©brait les Ă©vĂ©nements concernant la vie du clan, tels que les naissances ou les dĂ©cĂšs Â»[7].

Ce MARAE Ă©tait Ă©galement consacrĂ© au dieu polynĂ©sien ‘ORO, qui, Ă  l’origine dieu de la fertilitĂ© et de la fĂ©conditĂ©, est devenu en outre le dieu de la guerre. Des cĂ©rĂ©monies rituelles de dĂ©pĂŽt et de garde de son image (TO’O [8]) y avaient lieu. GrĂące Ă  cette consĂ©cration de ce MARAE TUPUNA Ă  â€˜ORO, les ARI’I [9] qui y Ă©taient consacrĂ©s pouvaient revendiquer le titre et les insignes de ARI’I RAHI MARO URA (Grand roi Ă  la ceinture rouge).

Au cours de ses fouilles archĂ©ologiques en 1927, Kenneth EMORY identifia son emplacement exact. Mais le site fut complĂštement bouleversĂ© et une sociĂ©tĂ© d’extraction s’y Ă©tait implantĂ©e.


Sources:

[2] ADAMS Henry. MEMOIRES D’ARII TAIMAI. Paris : SociĂ©tĂ© des OcĂ©anistes, 1964, N°12, 167 p.

[3] Un voyage missionnaire en 1797 Ă  bord du Duff : p.214, James WILSON

[6] Cellule communication de la Ville de PUNAAUIA

[7] Marae aux racines de la sociĂ©tĂ© polynĂ©sienne, Collection ITEA, page 18 © Tahiti Tourisme


Lexique:

[1] MARO’URA et MARO TEA. Ceintures rouges et jaunes symboles de haute naissance et de toute puissance dans l’ancienne sociĂ©tĂ© polynĂ©sienne.

[4] UNU : n.c. Bois sculptĂ© placĂ© dans le « marae » pour commĂ©morer les morts, chefs ou guerriers. Les  » UNU  » avaient une hauteur d’environ un mĂštre, ils Ă©taient larges et peu Ă©pais et suggĂ©raient une silhouette humaine. Ils Ă©taient peints en rouge. Cf. RĀ. Source : AcadĂ©mie Tahitienne, FARE VĀNA’A

[5] FATA. n.c. autel. Source : AcadĂ©mie tahitienne, FARE VĀNA’A

[8] TO’O. n.c (PPn *toko), piĂšce de bois qui forme le corps d’une idole. Source : AcadĂ©mie tahitienne, FARE VĀNA’A

[9] ARI’I. n.c Étym. PPn *’ariki, Prince, chef principal, roi. ARI’I NUI â€˜grand chef, roi’ ; ARI’I RI’I â€˜petite noblesse. Source : AcadĂ©mie tahitienne, FARE VĀNA’A