Pereita'i et la conque sacrée

Jadis, dans le district de Tefana i Ahura’i (Fa’a’ā), vivait une princesse qui s’appelait Pereita’i.

Fille du roi Maheanu’u et de la reine Moe, elle avait un jeune frùre, Mata’iruapuna, qu’elle aimait plus que tout.

Belle et charmante, elle passait ses journĂ©es sur les plages, au bord de l’eau avec ses servantes et ses amies de la haute noblesse.

Pereita’i rencontre Temuri

Un jour, sur la plage, accompagnĂ©e de ses amies, Pereita’i aperçut au loin Temuri qui pĂȘchait.

Sa pĂȘche Ă  la ligne sans succĂšs sur le rivage de Taunoa l’avait conduit Ă  Fa’a’ā.

Jeune et beau, il Ă©tait originaire de Pape’ete, des collines de Fautau’a.

SĂ©duite, la princesse envoya son messager pour l’inviter Ă  dĂ©jeuner. Ce qui fut chose faite.

Le repas terminé, Temuri fit don de ses plus beaux mulets et rentra chez lui avec un panier rempli de nourriture.

Le cadeau Ă  la famille royale

Heureux, il raconta à ses parents sa rencontre avec Pereita’i.

Au lever du jour, le jeune homme fut envoyĂ© Ă  Fa’a’ā pour remercier la princesse.

Un panier rempli des mets de Fautau’a fut prĂ©parĂ© par ses parents.

Il y avait des vÄ« tahiti et des anguilles.

ApprĂ©ciant le cadeau, le roi offrit en retour les cĂ©lĂšbres māpē rĂŽtis de son district.

Un amour interdit

Depuis ce jour, les deux jeunes gens se rencontrĂšrent rĂ©guliĂšrement et finirent par s’aimer. Ne pouvant plus se passer l’un de l’autre, ils dĂ©cidĂšrent de se marier.

Lorsqu’il apprit leur idylle, le roi Maheanu’u affirma son dĂ©saccord et bannit Temuri de Fa’a’ā. Une princesse ne pouvait pas s’unir avec un homme du peuple.

Pereita’i et son bien aimĂ© dĂ©cidĂšrent de s’enfuir Ă  Papeno’o pour s’y marier et s’installer.

Mais, un Tahu’a ayant appris leur projet, tua le jeune homme qui mourut rapidement sous les coups de son casse-tĂȘte. Puis, il dĂ©posa son corps sur le marae en offrande au dieu Grillon.

Pereita’i à Ra’iātea

Le chagrin de la princesse fut si grand que le roi organisa un voyage aux Îles-Sous-Le-Vent avec l’espoir qu’elle aille mieux. AprĂšs un sĂ©jour Ă  Huahine, la famille royale s’arrĂȘta Ă  Ra’iātea.

Peu de temps aprĂšs, Pereita’i fut mariĂ©e Ă  Teraimarama, le jeune Chef de l’üle sacrĂ©e.

Un an s’écoula, et, alors qu’elle eut une petite fille, ses parents dĂ©cidĂšrent de rentrer Ă  Tahiti, laissant Ă  ses cĂŽtĂ©s son jeune frĂšre.

L’humiliation de la princesse

Quand vint la saison du battage de tapa, la princesse rejoignit un groupe de jeunes filles de l’üle voisine et participa Ă  la confection de l’étoffe.

HumiliĂ©e lorsque ces nouvelles amies apprirent l’existence de son enfant, Pereita’i courut se rĂ©fugier Ă  Fa’aroa, Ă  la pointe Teoraaotaha.

Un sĂ©jour dans le Pƍ

Alors qu’elle pleurait sur un gros rocher, elle s’aperçut que son frùre l’avait suivie.

Voulant l’éviter, Pereita’i se jeta dans un trou noir prĂšs de la riviĂšre, et tous deux se retrouvĂšrent dans le Pƍ, dans le monde des esprits.

Accueillis par leurs ancĂȘtres, ils y restĂšrent une annĂ©e entiĂšre.

Durant leur sĂ©jour, Mata’iruapuna reçu la plus grande et la plus mĂ©lodieuse des conques appelĂ©e PĆ«-i-roroi-tau.

Rapidement, il apprit Ă  en jouer. Chaque son Ă©tait si fort qu’à la surface de l’eau, les habitants de Manotahi l’entendaient lorsqu’ils pĂȘchaient prĂšs de la passe Tuatāmiro.

Le retour dans le monde des vivants

Quand vint le jour, Pereita’i et Mata’iruapuna reçurent l’ordre de rentrer dans le monde des vivants.

Conduits dans un tunnel donnant accĂšs Ă  la grotte Tuatāmiro de Manotahi, ils furent projetĂ©s Ă  la surface de l’eau jusqu’à Nu’uroa.

Le jeune frùre souffla trùs fort dans sa conque attirant ainsi l’attention des habitants qui les reconnurent. Rapidement, ils furent reçus par le grand Chef Pohuetea.

PĆ«-i-roroi-tau offerte au Chef de Puna’auia

Pour le remercier de son accueil, Mata’iruapuna lui offrit sa conque PĆ«-i-roroi-tau.

Alors, en souvenir de cet Ă©vĂšnement, Pohuetea donna Ă  son district Manotahi le nom de PĆ«-nā-’au-ia (la conque est mienne).

Plus tard, la belle conque consacrĂ©e aux dieux du grand marae de Puna’auia fut cachĂ©e, et jamais personne ne la retrouva.

Sources :HENRY, Teuira (1847-1915). Tahiti aux temps anciens traduit de l’anglais Ancient Tahiti par Bertrand Jaunez. Paris : MusĂ©e de l’Homme, 1951 – Collection Publications de la SociĂ©tĂ© des OcĂ©anistes, 723PERE, Paul. Matahiapo de la Ville de PUNA’AUIA. Interview du 20 juin 2019.