‘Oro, le Dieu de la Terre, du firmament et de la guerre

« Cette nuit se nommait la nuit MUA-TAAROA. C’était la nuit de naissance du dieu ‘ORO, le dieu du firmament et de la terre, des sacrifices humains et des ‘ARIOI[1] Â»[2], le dieu, Ă  l’origine, de la fertilitĂ© et de la fĂ©conditĂ©.

Fils aĂźnĂ© du grand dieu TAAROA et de HINA-TU-A-UTA[3], fille de haut rang ayant pour parents TEFATU et FAAHOTU, lorsque ‘ORO naquit Ă  ƌPOA, sur l’üle de RAIATEA, « son pĂšre lui donna pour demeure ĆŒPOA avec le marae Tini-rau-hui-mata-tepapa-o-Feoro (myriades fĂ©condes qui gravĂšrent les rochers de Feoro), par abrĂ©viation Feoro , nom premier du marae taputapuatea. Il devient bientĂŽt trĂšs puissant et les gens du pays ainsi que des rĂ©gions Ă©loignĂ©es de Raiatea le reconnurent comme Dieu suprĂȘme de la Terre et des Airs. Le nom de Feoro fut changĂ© en Vaiotaha (
) et devint le nom de tous les mara’e dĂ©diĂ©s Ă  Oro. Dans ce marae, l’image d’Oro Ă©tait faite de corde finement tressĂ©es, et reprĂ©sentait un homme, de 80 cm Ă  1 m de longueur, dĂ©corĂ© de plumes jaunes et rouges et d’une ceinture de plumes rouges Â»[4]Il Â« eut droit, comme tous les autres dieux, « Ă  son messager, NAVENAVE, et son aide de camp, TUTAE-AVAE-TOETOE, qui gardait les victimes des sacrifices humains offerts Ă  ‘ORO »[5].

ConsidĂ©rĂ© tel le plus grand dieu de toutes les dĂ©itĂ©s, et alors qu’il hĂ©rita du plus grand MARAE de la PolynĂ©sie française, le MARAE TAPUTAPUATEA de RAIATEA, deux autres grands MARAE de PUNAAUIA, le MARAE TAPUTAPUATEA A NU’UROA, et le MARAE TAHITI Ă  PUNARU’U furent Ă©galement consacrĂ©s en son honneur.

Sa lĂ©gende raconte qu’il vivait aux cieux oĂč il Ă©tait le roi.

Un jour, ‘ORO prĂ©cipita maladroitement sa femme TU-FEUFEU-MAI-TE-RAI, Se transformant en tas de sable, ‘ORO perdit alors la mĂšre de ses trois filles et de son fils, du ciel sur la Terre.

Ses deux sƓurs, HAOAOA et TEURI, entreprirent un voyage sur Terre pour lui chercher une nouvelle Ă©pouse. Elles essayĂšrent de trouver la perle qui conviendrait Ă  ‘ORO Ă  TAHITI, HUAHINE, RAIATEA puis TAHA’A, mais sans succĂšs. Elles se rendirent finalement Ă  BORA BORA oĂč on leur parla d’une jeune princesse trĂšs belle, VAI-RAU-MATI. Quand on leur prĂ©senta la jeune fille, elles furent Ă©merveillĂ©es par sa beautĂ©. La princesse accepta de devenir l’Ă©pouse de ‘ORO et les sƓurs retournĂšrent au ciel.

Le lendemain, ‘ORO descendit sur Terre, grĂące Ă  son arc-en-ciel, pour faire la connaissance de VAI-RAU-MATI. Peu de temps aprĂšs, le mariage eut lieu. L’Ă©pouse reçut de nombreux cadeaux venus de toutes parts, ce qui embarrassa ‘ORO car il n’avait rien de terrestre Ă  lui offrir. Tout Ă  coup, une idĂ©e lui vĂźnt Ă  l’esprit. Il fĂźt venir ses deux serviteurs et les changea en un couple de cochons qu’il donna Ă  sa femme. La nuit suivante, la truie mit bas cinq petits porcelets. Le premier animal devĂźnt celui de VAI-RAU-MATI. Le second fĂ»t jetĂ© Ă  la mer et devĂźnt un marsouin. Le troisiĂšme fĂ»t rĂŽti. Le quatriĂšme fĂ»t rĂ©servĂ© au marae et le cinquiĂšme devĂźnt le cochon sacrĂ©.

Le TO’O[6] du dieu ‘ORO

« ComposĂ© d’un noyau en bois massif recouvert de couches de cordage de fibre de coco tressĂ©es, les images de ‘Oro apparaissent presque clownesques, les yeux, les oreilles et autres traits faciaux n’Ă©tant que lĂ©gĂšrement dĂ©limitĂ©s dans la couche externe de la fibre de coco. La pratique consistant Ă  emballer des images sacrĂ©es dans des couches de cordage ou d’Ă©corce de fibre de coco Ă©tait rĂ©pandue en PolynĂ©sie et Ă©tait souvent accompagnĂ©e de chants. Pendant que l’artiste travaillait, il ou elle a littĂ©ralement tissĂ© le pouvoir des chants dans les enveloppes de fibre, augmentant le mana (pouvoir surnaturel) de l’image Â»[7].


[1] â€˜ARIOI. n.c. ConfrĂ©rie de baladins com-prenant 8 classes et dans laquelle on Ă©tait admis aprĂšs une sorte de noviciat. Leurs cĂ©rĂ©monies prenaient leur origine dans des lĂ©gendes concernant le dieu ‘ORO. Des tatouages Ă©taient la marque distinctive de chaque classe. Les deux sexes Ă©taient admis dans la confrĂ©rie mais on n’acceptait que des gens sans enfants. Les « ‘Arioi » se dĂ©plaçaient d’Ăźles en Ăźles sur des pirogues spĂ©ciales. Logeant dans des maisons spĂ©ciales appelĂ©es « fare ‘arioi », ils donnaient des spectacles toujours nocturnes. Ces fĂȘtes donnaient lieu Ă  des repas pantagruĂ©-liques qui laissaient souvent les Ăźles dĂ©munies de ressources pendant plu-sieurs mois. Les dimensions des « fare ‘arioi » tĂ©moignent de l’importance sociale de cette confrĂ©rie. TrĂšs peu de temps aprĂšs la conversion au christia-nisme, cette confrĂ©rie fut supprimĂ©e. Source : AcadĂ©mie tahitienne, FARE VĀNA’A

[2] JUSTER, Alexandre.  La mythologie tahitienne pour tous : Maui, Hiro, Hina et compagnie. Pologne : Les Editions de Moana, 2017, 1 vol. (128 p.).

[3] THE JOURNAL OF THE POLYNESIAN SOCIETY. KOOIJMAN, 1892-2015, Simon. Ancient Tahiti God-figures. Nouvelle ZĂ©lande : The Polynesian Society, Inc, 1964, vol. 73, No. 2, p.110 – 125.

[4] Par Tahiti HĂ©ritage. HENRY, Teuira. Tahiti Ancient. Tahiti aux temps anciens. Traduit de l’anglais par Bernard JAUNEZ. Paris : SociĂ©tĂ© des OcĂ©anistes, 2004, 671 p.

[5] JUSTER, Alexandre.  La mythologie tahitienne pour tous : Maui, Hiro, Hina et compagnie. Pologne : Les Editions de Moana, 2017, 1 vol. (128 p.).

[6] TO’O. n.c (PPn *toko), piĂšce de bois qui forme le corps d’une idole. Source : AcadĂ©mie tahitienne, FARE VĀNA’A

[7] Rev. George Bennet; K. Webster, Esq., until 1957; K. John Hewett, London, in 1957; Nelson A. Rockefeller, New York, 1957, on permanent loan to The Museum of Primitive Art, New York, 1957–1978